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14 avril 2020 | Blogue

Transferts en franchise d'impôt en vertu de l'article 85

Par Gerry Vittoratos, expert-fiscaliste

L'article 85 de la Loi de l'impôt sur le revenu (LIR) est un outil important dans l'arsenal fiscal des sociétés. Il peut être utilisé dans de nombreux cas pour reporter l'imposition de certaines transactions, en particulier des structures d'entreprise complexes. Dans cet article, nous verrons les tenants et aboutissants de cet important article de la LIR.

But des transferts en vertu de l'article 85

Le but principal des transferts en vertu de l'article 85 est de transférer des actifs avec report d'impôt d'un contribuable (cédant) à une société canadienne (cessionnaire). L'exemple courant de l'utilisation de cet article est lorsqu'un contribuable, qui est un travailleur indépendant, veut incorporer son entreprise et veut éviter une imposition immédiate sur le transfert d'actifs à sa société nouvellement créée.

Un contribuable peut être un particulier, une société ou une fiducie. Une société canadienne est définie en vertu du paragraphe 89(1) de la LIR comme une société constituée au 91Ô­´´ ou un résident du 91Ô­´´ depuis le 18 juin 1971.

Vous pouvez transférer des actifs entre les contribuables et les sociétés avec report d'impôt, mais cela est à la discrétion du contribuable. Dans certains cas, il pourrait être avantageux de déclencher une transaction imposable, comme un gel successoral*. Cela se fait par le biais du montant choisi.

Principaux avantages de l'utilisation des transferts en franchise d'impôt en vertu de l'article 85

  • Le report du paiement des impôts dans le cadre de transactions qui ne donnent pas lieu à une cession économique réelle de biens (p. ex. la constitution d'une société).
  •  Faciliter les réorganisations d'entreprise.
  • Rendre certains gels successoraux possibles :
    • par le transfert d'actions à une société;
    • par le transfert d'actifs à une société.
  • Bénéficier des avantages juridiques et fiscaux reliés à une société.

Inconvénients de l'utilisation des transferts en franchise d'impôt en vertu de l'article 85

Double imposition potentielle des gains en capital

Le transfert de biens à une entreprise peut entraîner une double imposition au niveau des gains en capital; soit une fois pour la société sur le bien acquis et une fois pour le contribuable sur le bien reçu en retour. Par exemple, si le contribuable transfère un actif de valeur au prix coûtant (montant choisi) à une société et reçoit une contrepartie en actions, une vente rapide de l'actif par la société et des actions par le contribuable créera un scénario de double imposition (le gain de la différence entre la JVM et le montant choisi sera réalisé simultanément pour les deux parties). Cet inconvénient peut être minimisé si les actions de la société sont vendues à une date ultérieure.

Conditions de base des transferts en vertu de l'article 85

Le tableau ci-dessous énumère les conditions de base d'un transfert en vertu de l'article 85 :

Conditions
 1 Le cédant est soit un particulier, une société ou une fiducie [LIR 85(1)]
 2 Le cessionnaire est une société canadienne imposable [LIR 89(1)]
 3 L'actif transféré est un bien admissible [LIR 85(1.1)]
 4 La contrepartie reçue du cessionnaire doit comprendre au moins une action du capital-actions
 5 Un choix conjoint (T2057) doit être produit dans le délai prescrit [LIR 85(6)]

Termes à retenir

Bien admissible - LIR 85(1.1)

Les biens admissibles qui peuvent être transférés en vertu de l'article 85 sont les suivants :

  • les immobilisations amortissables (comprend les immobilisations admissibles)
  • les immobilisations non amortissables
  • les avoirs miniers canadiens
  • les avoirs miniers étrangers
  • les biens à porter à l’inventaire
  • les immobilisations appartenant à une personne non-résidente, mais utilisées dans une entreprise exploitée au 91Ô­´´

Cet article se concentrera sur les biens amortissables, les biens non amortissables et les biens à porter à l'inventaire.

Contrepartie pour le cédant [LIR 85(1)]

En échange du bien transféré, la société (cessionnaire) peut fournir divers types de contrepartie. La seule exigence selon la LIR est qu'une partie de cette contrepartie doit être des actions de la société.

Contrepartie autre que des actions (complément d'échange)

Si une partie de la contrepartie versée au cédant est en espèces ou une nouvelle dette de la société cessionnaire, ce montant est considéré comme le complément d'échange. Ce montant joue un rôle important dans la détermination des prix de transfert autorisés (voir ci-dessous).

Montant choisi

Il s'agit du montant qui a été choisi par le contribuable (cédant) et la société (cessionnaire) comme prix de transfert du bien.

Prix de transfert et montant choisi

Comme mentionné ci-dessus, l'objectif principal du choix prévu à l'article 85 est de transférer des actifs entre les contribuables et les sociétés avec report d'impôt. Des règles spécifiques régissent ce prix de transfert :

Disposition générale et montant choisi [LIR 85(1)a)]

La disposition générale stipule que le montant choisi est réputé être, pour le cédant, le produit de disposition du bien et, pour le cessionnaire, le coût d'acquisition du bien.

Valeur plancher [LIR 85(1)b)]

La valeur plancher du montant choisi ne peut pas être inférieure à la contrepartie autre que des actions (complément d'échange).

Valeur plafond [LIR 85(1)c)]

La valeur plafond ne peut pas être supérieure à la juste valeur marchande (JVM) de la propriété.

Les valeurs plancher et plafond sont les limites générales du montant choisi.

Il existe également des limites spécifiques en fonction du type de bien transféré.

Limite spécifique aux biens à porter à l'inventaire et aux immobilisations non amortissables [LIR 85(1)c.1)]

Le montant choisi ne peut être inférieur au moindre des montants suivants :

  • la JVM du bien
  • le coût indiqué du bien  

Limite spécifique aux biens amortissables [LIR 85(1)e)]

Le montant choisi ne peut être inférieur au moindre des montants suivants :

  • la JVM du bien
  • le coût indiqué du bien
  • la fraction non amortie du coût en capital (FNACC)

Coût de la contrepartie

Comme mentionné plus haut, lors du transfert, une partie de la contrepartie reçue par le contribuable (cédant) pour les actifs transférés doit comprendre des actions de la société. Elle peut également inclure une contrepartie autre que des actions, ou complément d'échange (voir ci-dessus). Le coût de cette contrepartie est établi comme suit :

Contrepartie autre que des actions (complément d'échange) [LIR 85(1)f)]

Le coût du complément d'échange reçu en contrepartie est la JVM du bien reçu s'il s'agit d'un seul article. S'il y a plusieurs articles, le coût sera alors le moindre des montants suivants

  • la JVM du bien reçu
  • la JVM de l'actif reçu / la JVM de tous les autres actifs reçus (complément d'échange)

Actions privilégiées [LIR 85(1)g)]

Le coût des actions privilégiées reçues en contrepartie résulte du calcul suivant :

Le moindre des montants suivants :

la JVM des actions reçues après la disposition

XX

le montant de la disposition (montant choisi)

XX

Moins :

la JVM de la contrepartie autre que des actions (complément d’échange)          X

la JVM des actions privilégiées de cette catégorie

la JVM de toutes les catégories d’actions privilégiées

(XX)

Coût des actions privilégiées

XXX

 

Actions ordinaires [LIR 85(1)h)]

Le coût des actions ordinaires reçues en contrepartie résulte du calcul suivant :

Montant choisi

XX

Moins : la JVM de la contrepartie autre que des actions (complément d’échange)

(XX)

Moins : le coût des actions privilégiées (voir ci-dessus) [LIR 85(1)f)]

(XX)

Coût des actions ordinaires

XXX

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